jeudi 22 juin 2023

Oulala


Dans la réunion Oulala contre le lien (8km manquants qui complétera le périphérique autoroutier de Montpellier), j’ai vu des gens qui étaient anti-ZAD, il paraît par rapport aux expériences d’une ZAD qui a mal tourné il y a deux ans. Il me manque les détails. Il n’y a aucune intention, il paraît, de faire, ou même de proposer, des alternatifs au modèle industriel, juste le réactionnaire de « pas de lien » et cela me paraît, en bref, socialement regressif au plus haut niveau.

Politiquement, c’est ce genre d’action qui fait perdre toute crédibilité populaire à l’activisme écologique. Que dirait un sans-papiers marocain, qui trouve de l’embauche dans ces chantiers de déstruction de la nature qui sont en cours partout autour de Montpellier, si les écolos veulent juste qu’il perde son boulot, à cause d’un petit reptile qui est un « espèce protégé » ? Pourquoi ne pas lui proposer un travail horticulturel ?

Je pense que la première chose à réfléchir, c’est comment faire perdurer et augmenter l’envergure des actions locales, avec une visée sur la condition des plus démunis. Je propose, pour parler jargon, des circuits ZAD – des ZADs mobiles et bien sûr, des ZADs partout. Je pense aussi que les gens en ont marre d’actions purement à visée médiatique ou symbolique, actes de présence, pétitions, actions légales et constitutionnelles … au service des riches qui vivent à la campagne, qui devient un périurbain totalement artificialisé, à l'exclusion des pauvres qui vivent dans la métropole.

Il faut surtout défaire l’industriel en ville (et autour de la ville,donc, pas une "ceinture verte" mais plutôt une corde d'étranglement grise), pour la rendre vivable, et rouvrir la campagne aux pauvres – qui ne sont plus là. Il y a des pauvres riches à la campagne, c’est vrai, mais c’est parce que tout leur argent va pour alimenter la voiture.

Il manque un modèle où les pauvres des villes peuvent, avec leur travail manuel dans les jardins forestiers, venant à vélo et à pied, réinvestir la plupart de la surface de la France, « peuplée » par des deuxièmes résidences, des agriculteurs avec tracteur, sans ouvriers, et une biodiversité inférieure à celle des villes et des « friches » attendant le « développement » autour des villes – des déserts ruraux avec des populations ageissantes.

Le problème pséphologique – que la campagne vote massivement à droite, avec le « gerrymandering » systémique qui existe depuis De Gaulle, a une solution immédiate – la repeupler avec des gens qui votent à gauche.

On est en train d’être poussés à penser, à proposer, et à faire vivre des infrastructures, surtout au niveau transport et communications, qui sont vraiment écologiques. Par le gouvernement – c’est cela qui est triste. En illégalisant, en rendant chaque fois plus dangéreuses les actions réactives, il oblige à penser à ce qu’on peut faire positivement.

Le monde naturel n’est, après tout, que la réflexion des effets combinatoriels de la vie. Si nous n’arrivons pas à nous combiner, nous ne vivrons pas. La décision, à la ZAD de Nantes, un dur hiver de luttes constantes, juste avant Noël, en 2013 il me semble, en tout cas j’y étais, était d’envoyer chier tous les bienfaiteurs avec la malbouffe qui s’amontonnait, et de commencer à labourer la terre, directement. Comme les Diggers – mes ancêtres, qui au dix-septième siécle ont fait exactement ça.

Lorsqu’on considère les zones à défendre, tree protests, free festivals, et autres formes d’activisme, la chose qui marque, c’est l’arrivée sur place de plusieurs milliers de personnes qui doivent être nourries-logées et intégrées à l’action. Souvent, leurs mouvements en voiture et leur manière d’occuper la terre détruit la nature qu’ils sont là pour protéger. Ce qui est désolant, et qui commence à lancer la réflexion, sur "comment faire".

Les autres formes de protestation, les manifs qui défilent dans la rue, incidents créés pour attirer l’attention du média, n’ont pas ces besoins logistiques. Elles sont éphèmères, et très peu chères.

Elles ne changent rien. Il paraît que les activistes écologiques sont déterminés à se rendre marginaux, par rapport aux enjeux sociaux. Les sans-abris ? Ils n’ont que faire. Les mal-logés en canicule ? Non plus. Cela, c’est l’affaire des autres. Les réfugiés, les réfugiés climatiques ? Ce n’est pas notre business. On fait tout comme si le Rassemblement National était déjà au pouvoir, en faisant l’amalgame entre localisme et intérêts de la nature. Il y a une solution – de bouger, mais pas vite, de laisser des traces positives sur son chemin, d’apporter de l’énergie et des savoirs humains, de recevoir un bon accueil et orientation. Des solutions humaines, gagnant-gagnant.

Il y a un entre-deux, une combinaison, qui agit au bénéfice des deux populations, les sédentaires et propriétaires d’un côté, la main d’oeuvre qui bouge et qui remplace la dépendance aux voitures des populations âgées et isolées de l’autre. C’est justement ce système d’accueil-orientation contre travail sur des circuits réguliers. C’est un système qui gagne sur le système industriel économiquement. Celui qui n’a pas de voiture à payer, il empoche ce qu’il gagne.

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